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The Incredible Melting Reviews of The Incredible Melting Man
Imaginez. L'aéroport du Bourget en période creuse pendant la grève des aiguilleurs. Des feuilles mortes virevoltent sur l'unique piste d'atterrissage tandis qu'un homme attend sagement dans sa tour de contrôle que le réalisateur ait une idée scénaristique de génie. Ne faisant ni une ni deux (Umberto ne sait pas compter), un personnage apparaît. C'est un homme. Il est barbu et porte une gabardine. L'homme est journaliste. Il est flanqué d'un acolyte avec une caméra. L'acolyte est caméraman. L'homme se trouve là, car un éminent machin-chose doit arriver en avion et que ça serait pas cool de pas faire de tophes. Comme l'événement est de taille, il doit se frayer un chemin parmi la foule bigarrée des deux journalistes eux aussi présents. C'est à cet instant que Lenzi touche du doigt l'état de grâce de tout bon cinéaste transalpin, il a l'idée démoniaque de faire arriver un avion. Ceux qui sont encore devant la télé se redressent et tendent l'oreille. 'Bip' fait le casque de notre robinson aiguilleur qui, d'un air pénètré, tend lui aussi l'oreille et pâlit. "Va fa enculo, un avioni se dirigiglia vers nostro.... What are we gonna do fucking fuck ???" (il faut penser à la vente internationale!!). Et si cet avion, comme ça, il était de l'apocalypse hein?!... Ben oui quoi on pense rarement aux avions qui se posent sur les aéroports. Si ça se trouve ils sont tous de l'apocalypse et on est même pas au courant... ça se paiera un jour... Pendant donc que ce fier destrier aérien entame son approche de la piste sous l'oeil médusé des feuilles mortes décidément venues en nombre, l'aiguilleur ermite trifouille un bouton qui n'en demandait pas tant et, en faisant semblant de s'intéresser a ce qui se passe, déclame dans sa voix la plus virile et dans un micro "Ma que passa? Who are you? What's your bloody fucking name stranger?" et c'est là que le suspense nous prend - l'avion ne répond pas. Pas même un petit vroum. Rien. L'aiguilleur survivant se frotte le menton "Humm Humm es ist sehr strangeglio" et il n'a pas tort. Alors que les feuilles mortes avalent leur chlorophylle ("se posera... se posera pas..." - librement traduit de la feuille), l'avion s'immobilise sur la piste. ET C'EST ALORS.... que rien. Le caméraman a laissé sa caméra tourner en plan fixe, et pendant que la foule des trois journalistes s'agglutine près de l'engin, le spectateur averti se demande qui va bien pouvoir sortir de l'appareil nom de dieu. De longues minutes passent (comptez trois à quatre bonnes minutes de plan fixe, secouez) sans que ni les Beatles ni 'Weird Al' Yankovic ne descendent du vaisseau éthéré. SOUDAIN SANS CRIER GARE... la porte s'ouvre. Puis... rien. C'est de la symbolique pure... "AAAAaaaaahhhhh..." un soupir de soulagement se fait entendre lorsqu'apparaît un homme, vieux, barbu, dans la main duquel une chose épaisse et dure est fermement serrée. L'homme a un couteau. On ne le voit pas mais si ca se trouve il a même un caleçon Calvin Klein. Comme chacun le sait, le barbu est fourbe. Le journaliste, lui, le devine et, tout en pinçant son téton gauche pour prendre une tête de circonstance, déclame "Huuuum il se passe quelque chose d'étrange...". Le journaliste est perspicace. C'est à cet instant précis que l'apocalypse du titre s'abat sur le peu de feuilles qui n'ont pas eu la bonne idée de se casser sur un tournage de Joe D'Amato. Une meute de types (une bonne huitaine) en kaki, en short, en tutu et en rollers sort en grognant de l'avion. S'ils grognent c'est que le maquilleur en panne de fond de thym leur a collé des tranches de tomates sur la gueule... on grognerait à moins... parfois, sous le coup d'une impulsion créatrice ravageuse, il leur colle quelques corn-flakes sous les yeux et basta. Non ne demandez pas pourquoi les maquillages s'arrêtent à la base du cou et pourquoi les mains ne sont pas maquillées, non. Ici on parle Art, sublimation du réel, euphorique transcendance des schémas cartésiens de l'Homme à l'Homme. On parle Amour, Joie et Nirvana, Krishna Krishna. Evidemment, tout ça ne nous aide pas à comprendre qui sont ces tomates hirsutes bondissant partout en faisant des prises de kung-fu et en mordant violemment tout ce qui bouge. Des zombies? un nouveau boys band? Des supporters du P.S.G? Même le grand Umberto ne peut éclairer notre loupiote. Ils sont laids, ils sont sales, ils bouffent tout ce qui passe à leur portée, ils votent FN, ils sont à exterminer d'urgence. Fort heureusement, Mel Ferrer veille (AHHH Mel Ferrer). En grand chef de l'armée il décide que "Crénom, on va en faire du ketchup" (Librement traduit de la mine décomposée et résolument inexpressive de Mel). On avance des hypothèses : Les tomates karatéka seraient des humains (DES HUMAINS!!) exposés à des radiations atomiques (traduction : des jeunes cadres dynamiques ayant trop fait d'U.V. Quoi que dans ce cas ça transforme plutôt les navets en carottes). Et logiquement, on balance les forces de l'ordre pour les détruire. On leur explique même comment : Visez la tête ! "blootch" répond un des militaires, "schlaaa" surenchérit un autre. Et les militaires de passer le reste du film à tirer partout, jusque dans les gouttes de sueurs qui perlent sous les bras des tomates, partout je vous dis. Tellement partout qu'il ne reste plus de cartouches pour les têtes... Ca c'est un coup dur!! C'est la dure loi immuable de la vie - même si le cinéma est une sublimation, les flics et les militaires restent cons. À partir de cet instant, les méandres du scénario deviennent insondables, accrochez-vous c'est du Duras. Les tomates courent partout, les héros sont héroïques, les femmes sont lascives, la bande-son bande son quoi d'ailleurs?, tout va mal, c'est l'apocalypse. Il y a plus de bordel à l'écran que dans le plus mouvementé des débats de Dechavanne. 'Niak je te mors', 'Boum je te tire dans l'omoplate', 'Grashnoo grignote', 'Pfrutchi in ze coude', on ne sait plus ou donner de la tête (surtout les militaires qui ne com-pren-nent pas). A ce propos je me remémore une anecdote anecdotique. Il fut un temps béni où les films d'Umberto sortaient sur les écrans parisiens (enfin je dis 'les'... un.). À cette époque mon frère avait dans les 9-10 ans, l'âge idéal pour voir le film. je m'empressait donc de lui forger une culture cinématographique irréprochable et le traînait voir le film qui présentement nous intéresse (vous je sais pas, moi si). Au bout de quinze minutes de projection, mon coeur faillit se décrocher, Xavier n'était plus assis sur le siège à ma droite... Kidnappé qu'il avait été par une force quelconque ou pire, par l'ouvreuse du Brady. 'Ouf' me dis-je. Jusqu'à ce que je m'aperçoive que Xavier n'avait pas été kidnappé par une force quelconque (pas folle !!...), il était sous le siège... mort de rire... Se ressaisissant avec peine, il se relevait pour assister à une scène clé du film. Décor : l'intérieur d'un bâtiment (un hôpital je crois), les tomates sont partout et de plus en plus nombreuses. Des centaines de milliers de billion de trilliard d'après les estimations de l'armée, 12 à l'écran. C'est la panique, ça courre dans tous les sens, ça tire dans tous les sens, et justement. Arrêtant sa course et freinant, le héro retrouve sa hérote, lui dit qu'il faut faire vite, que les secondes sont comptées, et lui roule une gamelle... interminable. A cet instant, Xavier, sans doute possédé par Jésus Franco, se retourne sur son siège, regarde les rares spectateurs encore en vie dans la salle et crie : "Pendant qu'on-y-est quelqu'un pourrait leur filer un matelas ?" il fallait que je vous le dise, les jeunes ne respectent plus rien... Malgré cela, ça galope sec dans les couloirs et, à peine décollés, le héro et la hérote en profitent pour s'enfuir les lâches. Ils terminent leur course dans un parc d'attraction désaffecté, suivis par une apocalypse de 4 figurants en tomate. La hérote (parce qu'il n'y a qu'une minette pour être aussi gourde) décide que pour échapper au talent du maquilleur, la meilleure solution est d'escalader les rails des montagnes russes...!!! Le héro, le mâle, sait que c'est une grosse connerie mais bon, c'est sa minette, faut pas la contrarier parce qu'après sinon elle a des règles douloureuses, alors il la suit, décontracté, se retournant parfois pour filer des coups de tatanes à l'apocalypse qui n'en finit pas de les suivre. Et là, Umberto est un génie. Un hélicoptère passe négligemment dans le coin, remarque que nos héros utilisent Clerasyl, jette une échelle sur la tête de la hérote qui s'y accroche. Mais gourde jusqu'au bout, elle lâche prise et se fracasse la tête quelques centimètres plus bas tout en oubliant pas de mourir. Le héro voyant ça écarquille les yeux, ouvre la bouche et hurle : 'Enfiiiiiiiiiiiiin!'. Imaginez maintenant un homme qui dort. C'est beau un homme qui dort. L'homme se réveille en sursaut, il a fait un cauchemar. Sa femme grommelante se retourne dans le lit l'air de dire qu'il s'est réveille en sursaut. L'homme dit que oui il a fait un cauchemar. Il bondit hors du lit et enfile une gabardine, l'homme est journaliste. On devine une chose longue et dure saillant sous ses vêtements, c'est un téléobjectif, l'homme est aussi photographe. Pendant ce temps, au Bourget, un avion est sur le point de se poser... Sur l'écran on peut lire 'Et le cauchemar devient réalité'. Pascal 'The Incredible Melting Man' Goubereau
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